Une succession de voitures me sourit et m'emmène par petites étapes jusqu'à la frontière que j'atteins avec un chauffeur pakistanais émigré depuis une dizaine d'années dans ce petit royaume qui l'a accueilli. Je change de pays, de chauffeur mais le décor est semblable, voir même plus dur. A la pauvreté semble succéder la misère. Ce sont deux soeurs qui s'accoquinent mal, alors nécessairement l'une prend le dessus sur l'autre comme dans toutes les familles de bas étage. Elles rampent et s'incrustent partout, visibles sans tape-à-l'oeil comme une deuxième couche de peinture pour cacher la douleur morale. Après Goba, les maisons de tôles sur le bord de la route abritent des familles qui vendent du charbon de bois dans des sacs entreposés mais d'où le sortent-ils et avec quoi le fabriquent-ils car il n'y pas un tronc à l'horizon. Le paysage sec légèrement vallonné n'a l'air de rien et ne se remarque pas mais la route se glisse impeccablement macadamisée comme un ruban sur une tête africaine crépue et rasée de près.



A Maputo, retenez les noms des rues et apprenez l'histoire de l'Afrique. Ils sont tous présents, les meilleurs chefs d'état tels Kwame Nkrumah (Ghana), Julius Nyerere (Tanzanie), Kenneth Kaunda (Zambie), Milton Obote (Ouganda), Agostinho Neto (Angola), Amilcar Cabral (Guinée Bissau / Cap-vert), Salvador Allende (Chili) comme les moins bon: Sékou Touré (Guinée Conakry), Kim II Sung (R.D.P.Corée du nord), Mao Tsé toung, Ho Chi Min, Vladimir Lénine, Karl Marx, Friedrich Engels, entre quelques avenues, rues ou ronds-points de dates essentielles à retenir qui ont marqué l'histoire du pays. Se sont-ils donné un rendez-vous posthume à Maputo, certains semblent ne s'être jamais serré la main, ni rencontré, alors pourquoi sont-ils venu donner l'accolade à leurs voisins défunts dont le nom est couché dans la rue perpendiculaire. Maputo, ville étendue et singulièrement marxiste-léniniste a eu droit à une retouche à la soviétique après la première couche de peinture portugaise. Pour ceux qui connaissent les villes russes, il n'y a pas de doute que l'orientation du pays pendant la période marxiste-léniniste a influencé l'architecture et l'urbanisme mozambicain.

"L'Afrique mal partie ou en perdition" fait souvent la Une des magazines dans le monde occidental, ce qui contraste singulièrement avec le pouvoir d'achat d'une infime partie de la population qui réussit bien, ce dont se plaint le propriétaire d'un 4 x 4 qui a traîné ses guêtres dans toute l'Europe et l'Amérique du nord. Il m'explique qu'il a baroudé sans le sou à St Tropez, à St Raphaël, à Juan-les-pins et à Monaco et que contrairement à l'image que l'on s'en fait, tous les Africains ne sont pas à considérer comme des idiots ou des moins-que-rien.

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