De l’Alsace à Budapest : Olivier me dépose sur une aire de service et j’embarque immédiatement dans un semi-remorque avec un chauffeur germanophone après avoir abordé un turcophone et un hispanophone dans leur langue d’origine. A l’aire de service du circuit d’hockenheim, je fais demi-tour en traversant le pont qui surplombe l’autoroute et repars en sens contraire direction Walldorf Kreuz(ung) puis l’autobahn A6 tout droit jusqu’à l’aire de service Hohenfranken tankstelle avec un jeune qui se dirige vers Allen.

Au moment ou je descends mon sac du coffre de la voiture garée en épi, une autre passe à côté et lorsqu’elle nous a dépassé, je peux reconnaître une plaque d’immatriculation hongroise. Le chauffeur avait sa vitre ouverte et je pouvais l’interpeller mais comment pouvais-je savoir qu’il était probablement magyar ? Il m’eût suffit, l’oeil aux aguets, de regarder la plaque avant qu’il ne nous dépasse. Un moment d’égarement, la concentration se relâche et tout fout le camp. J’ai loupé le coche! On peut toujours se consoler en se disant que seul au volant, il n’allait pas là-bas, en Hongrie où était immatriculé la voiture. Un autre chauffeur immatriculé en Autriche auquel je demande un passage me prétend qu’il ne va pas à Vienne. Je prétends qu’il ment mais ne lui montre rien de mes certitudes. Je ne suis pas là pour polémiquer mais un vendredi, les gens rentrent à la maison surtout s’ils sont dans la bonne direction pour aller vers l’Est.
Les Autrichiens sont rarement sympas lorsque l’on s’adresse à eux, limite xénophobes. Il suffit d’en parler aux routiers des pays de l’Est qui contournent tous l’Autriche à cause des taxes routières et de la sévérité des ses représentants chargés d’appliquer la loi. Les Turcs, les Roumains, les Serbes transitent par Prague et Brno (République Tchèque) puis Bratislava (Slovaquie) avant de rejoindre Budapest.
Qu’est-ce qui fait que de petits évènements insignifiants surviennent – on laisse passer une chance, cette voiture qui se rendait directement à Budapest – sans changer le cours de notre vie ? Je n’ai pas pu la saisir – la chance, l’opportunité – elle m’a filée entre les doigts…
Qu’a cela ne tienne, il y aura bien un autre signe du destin car sur la petite échelle d’une journée de 24h00, il s’agit bien de destinée dont je parle. Il suffit d’agrandir l’image et c’est à l’échelle d’une vie que nous travaillons. Vol direct ou avec escale ? Atteindre son but par « la voie détournée », c’est ce que bon nombre d’entre nous font – même s’ils en sont conscients ou le réalisent – alors qu’il existe une « voie directe » plus simple. Pourquoi nous échappe-t-elle ?

L’occasion qui suit immatriculée en république Tchèque. Est-ce « je » qui décide ou bien les évènements qui le font à ma place ? Il aurait été plus court de passer par l’Autriche mais voilà que je retombe dans mes petits travers et vais transiter par Prague.
Suis-je le flot des camions qui me transportent, le courant principal d’énergie qui nous entraîne et ne nous laisse que peu de pouvoir de décisions. Je peux me dire que, encore une fois, j’ai quelque chose à faire à Prague.


Nuit à Behounkova. Il y plus de 5 ans que je n’y ai pas mis les pieds. C’est l’appartement de Hana avec laquelle je viens de passer 3 semaines à vendanger chez Bruno. Je la connais depuis 15 ans environ. Un regret que je ne puisse revoir ses parents qui habitent de l’autre côté de la ville. Elle est absente mais Mirka, sa colocataire m’ouvre la porte. Hana me téléphone plus tard et me prévient qu’elle dormira chez ses parents. Je passe une nuit calme, réparatrice et décolle le samedi matin vers 10h15. Il y bien longtemps que je n’avais pas dormi a Prague. La nuit rallonge énormément mon temps de voyage (24h00 au lieu de 14h00). Il faut poser son sac, l’ouvrir, se reposer et repartir. L’été, je transite par Prague et me baille dans les fourrés, le fossé lorsque j’atteins Bruno ou la frontière slovaque.

J’ai du prendre le métro et une fois n’est pas coutume, j’ai poinçonné le billet valable pour un transfert. A la sortie du métro, bus n°228 ou 295 en tête, je demande à des passagers lequel desservent bien la station service à 3 km sur l’autoroute. Après bien des tergiversations, mes certitudes devenues des questionnements, l’un d’eux m’indique le 235 qui dessert Pruhonice, un village à 5 km, première sortie de l’autoroute. Il s’y rend par derrière, empruntant la route communale et marque régulièrement l’arrêt. A la première halte, je saute et récupère la bretelle d’autoroute que je rejoins d’habitude à pied depuis le métro. Autant faire simple et direct tant que possible.


Ces pays de l’Est qui ressemblent de plus en plus à l’Ouest : Voilà qu’il se met à neiger ! De bons vrais flocons ! Les voitures passent mais ne s’arrêtent pas, insouciantes, indifférentes, monstres métalliques effrayant d’égoïsme. L’individualisme a pris le pas sur la solidarité ces dernières années. Depuis l’ouverture au capital – pas vraiment celui dont parlait Marx mais plutôt celui de Keynes – si l’idéologie n’a pas changée, les mentalités ont elles « évoluées ». Rien de nouveau à l’Est, d’une dictature à l’autre, le système capitaliste a formaté les esprits et les modèle selon le schéma occidental. Qu’il est loin le temps ou l’altruisme, la gentillesse, la simplicité, la solidarité primaient sur les valeurs égotistes, le matérialisme, l’individualisme, le consumérisme.
Les véhicules sont dans l’obligation de passer à côté de l’aire de service qui se trouve sur l’autoroute avant la prochaine sortie… pour Pruhonice. Ils pourraient tout aussi bien se dire qu’en m’embarquant, je serai mieux à attendre à la station abritée que sur la bretelle ouverte à tous vents. Que je serai mieux à boire un café – même si je n’en bois jamais « c’est une boisson forte pour gens faibles » dicton allemand – que de me les geler dehors et attendre qu’un éventuel bon Samaritain m’emmène…
Comment peux-t-on être si stupide et ne pas faire preuve de jugement ? Ce n’est pas parce que je suis l’objet de cette mise à distance – mon petit ego s’en trouve peu offusqué, il observe équanimité, un peu en pétard tout de même – que je dois faire des commentaires peu complaisants sur les autres. L’indifférence blesse, l’intolérance tue.
Avant d’embarquer sur la bretelle, le rond-point en travaux, les voitures s’engagent et à ma hauteur font demi-tour sur le terre-plein qui garde traces des nombreux pneumatiques sur le retour.

Lors d’un ralentissement – n’a-t-on pas des temps de vie plus lent parfois – je saisis l’occasion pour faire un signe à un chauffeur dont le champ de vision dépasse celui de la moyenne des conducteur et y inclut l’espace dans lequel je me tiens. La vitre de son habitacle descendue, je n’ai pas de mal à le convaincre de me déposer à la station service.
Ouah !!! Un camion français immatriculé dans le Finistère (29) fait la coupure mais je me fais presque envoyé… chier lorsque je m’adresse au chauffeur qui ne parle pas un mot de la langue de Molière. Je passe à l’allemand, l’anglais, le russe. Il n’est pas possible qu’il ne baragouine pas l’une des ces langues s’il se déplace á travers l’Europe. Un deuxième chauffeur est monté côté passager et n’a pas l’air plus avenant. Il y a de plus en plus de camions immatriculés en France ou Allemagne conduits par des étrangers, coût de la main d’oeuvre oblige, sorte de délocalisation dans le domaine des transports routiers. Ils viennent régulièrement décharger en France et rechargent à l’export. Libre concurrence oblige – les lois européennes existent - un transporteur bien connu se permet même de faire du régional pratiquant le dumping en ce qui concerne les prix du fret avant de recharger vers l’étranger.

Exemple: le camion décharge à Lens en provenance de l’étranger. Dans l’attente d’un chargement, il transporte de la marchandise à peu de frais de Dunkerque à Marseille où il recharge pour l’exportation. Le patron bien intentionné peut même faire tourner son chauffeur toute la semaine dans l’hexagone laissant des miettes aux chauffeurs français qui n’ont plus de fret à se mettre sous la dent.

Un second camion immatriculé dans le Finistère est garé en épi avec à son volant….une femme. Qu’elle n’est pas ma surprise quand elle baisse la vitre de découvrir Bénédicte. Il y a déjà plusieurs années que les chauffeurs français ne passent plus à l’Est mais là, me dominant sur son siége, une femme seule ose s’aventurer dans ces pays. Je dois la décider pour qu’elle m’emmène un peu plus loin.
La partie n’est pas gagnée ! Ce serait ridicule de tomber sur une Française et de ne pas faire un bout de chemin ensemble. Au mois d’août, j’en ai croisé une autre, une femme pilote qui m’a abordé la première pour me demander si je faisais du stop. Elle sortait d’une douane et allait dans le sens inverse. Je n’aurais pas eu besoin de lui forcer la main comme je le fais avec Bénédicte. Elle finit par accepter. C’est par pur hasard que les 2 camions immatriculés ans le Finistère sont garés l’un à côté de l’autre. Bénédicte connaît pourtant le patron de l’autre chauffeur qui devrait être seul au volant, raison pour laquelle je n’ai pas été bien accueilli car il se sentait certainement en faute. Il s’agit d’un Français qui s’est « délocalisé » en république Tchèque.

Nous quittons finalement l’aire de service. En fait, Bénédicte a été difficile à convaincre car elle n’a pas pu prendre sa douche car elles étaient en réfection. On lui a certifié qu'il y en avait plus loin. Qu’il est difficile aussi d’être une femme au volant et de ne pas être confondue avec celles qui « soutiennent » les routiers. On ne s’attend pas à une telle réalité ! Il faut se battre dans un monde machiste et encore plus dans un monde où ne gravitent que des hommes… et dans lequel les femmes risquent de se tromper lourdement. Il a fallu que la caissière me remarque à l’entrée pour lui donner la clé des douches. « Une mijaurée qui s’invite dans les douches ! » a-t-elle du penser.

Il y a quelques semaines, elle a du payer en Pologne une amende d’un montant égal à ce qu’elle gagne en un mois (1500 euros) sinon le camion était immobilisé. Puis elle peste contre un journaliste d’un magazine bien connu des « routiers sont sympas » qui a écrit un article à son insu Je la quitte à la frontière slovaque sous la neige et la pluie. La nuit est proche et je saute aussitôt dans un camion hongrois en direction de Budapest. J’ai eu le temps de visionner les photos du voyage au Maroc de ses parents sur l’ordinateur portable qui l’accompagne. Qu’est-ce qui pousse une femme à devenir chauffeur routier ? Voyager, s’évader et sortir de la routine…


Actions Caritas-tives en Ukraine: Je retourne où je suis allé fin août et Arthur, Polonais, responsable du centre m’accueille une nuit. Je fais le choix de rester deux autres nuits dans le centre. Je peux ainsi participer ou mieux observer ce qui s’y fait et être « acteur » même si la « discothèque » – une party organisée par le veilleur pour les handicapés - m’empêche de trouver le sommeil, la veille de mon départ. Je revois Maria, étudiante de français à l’université et lui donne plusieurs livres de littérature que j’ai pensé à emporter.

Le samedi, je le passe avec les enfants. Une « Peace corps » américaine les encadre et essaye de recréer sa « petite Amérique ». Je déjeune avec eux d’une soupe de pommes de terre, de purée garnie de chou rouge, sauce champignon et d’une tranche de mortadelle.
Le dimanche, avec José né en Argentine en 1946 et revenu avec ses parents ukrainiens en 1954 suite à l’appel de Staline, je visite une ancienne base militaire russe qui abritait des têtes de missiles nucléaires dont la puissance équivalait á 60 fois celles conjointes qui ont servi à détruire Hiroshima et Nagasaki. Cet endroit en cours de rénovation est utilisé maintenant pour loger et réhabiliter des drogués ou gens qui sortent de la prison. Nous échangeons en espagnol. Il met à ma disposition un vélo pour que je puisse faire le tour du propriétaire car la base couvre 85 hectares. Caritas a investi le bâtiment principal et l’annexe qui fournissait le chauffage et l’eau chaude. 14 hommes et 2 femmes sont ainsi éloignés de toute tentation, à 8 km de Drohobych, bourgade qui compte 850 ans d’existence. En 1939, la ville comptait 10 000 Polonais, 10 000 Ukrainiens et 15 000 Juifs (40%) qui furent décimés dans les forets proches de Bronice ou le camp d’extermination de Belzec.
De part et d’autre de la frontiere ukraino-hongroise, des magyars de souche vivent à l’heure de Budapest comme s’ils dependaient toujours du regime qui les a vu naître. La Hongrie, grand empire devenu petit pays comme le grand duche de Pologne, a été amputée de plusieurs de ses membres. La capitale au centre du pays demeure au coeur des activites culturelles, économiques et le cerveau avant-gardiste des combats et joutes politiques dans la lignée du soulèvement de 1956.


La Roumanie: A la croisée des chemins. Avec une pointe de regrets, la Transylvanie, historiquement rattachée à la puszta et adossée au contrefort montagneux des Carpates couvre une large partie de la Roumanie. La langue parlée y est bien sûr le hongrois. J’attrape un couple de jeunes juifs à la frontière qui vivaient encore peu en Israel. Il l’est de naissance et Alena, hongroise apprenait l’hébreu dans son pays dont il porte le même nom. Il est donc par conséquent le frère d’Ismael, fils d’Abraham. Ils se sont mariés, y ont vécu 5 ans et ont décidé de voyager. Il apprend le hongrois a Budapest et a fait des études comme technicien agricole en Israel. Elle a un accent prononcé en anglais qui me rappelle celui des Américains, le sien est plus limite et moins fluide. Alena parle courament l’hébreu et c’est la langue qu’ils utilisent pour communiquer. C’est impressionant de l’entendre. Par mimétisme, elle capte les intonations et en fait presque sa langue maternelle qui n’est pourtant pas la langue la plus facile à parler pour une non native.

A Brasov, je trouve refuge dans un petit oratoire parmi les tombes d’un cimetière au milieu duquel trône une église. Je suis au moins sûr de ne pas être dérangé. J’ai bien essayé de rencontrer quelqu’un dans la rue à 22h00 mais manque de bol. Il y a eu un jeune anglophone, un marocain dans un bus puis deux jeunes filles dont l’une était prête à m’aider mais pas la seconde. Ce seront les morts qui auront le dernier mot et le dernier soupir avant de m’endormir. En fait, le sol cimenté froid me tient éveillé. Il n’y a même pas quelques flammes qui montent de l’enfer où brûlent les âmes tourmentées pour me réchauffer. Le matin lorsque la grand-mère en charge de l’église fait glisser la porte métallique, la peur la saisit. Un chauffeur anglophone s’approche et me fait la morale comme si transi par le froid, j’avais besoin d’être réconforté de cette façon. Je quitte mon purgatoire pour une bretelle d’autoroute et le Dieu Jionut vient me tirer d’un mauvais pas. Il apprend le français car il veut émigrer au Canada avec sa femme infirmière. Qui ne veut pas quitter la Roumanie ? Lui travaille dans la sylviculture. Il est inscrit sur HC – www.hospitalityclub.org - mais n’est pas membre actif. Quand nous atteignons Ploiesti, je laisse mon sac dans son coffre et garde même les clés de sa voiture car j’ai dans l’idée de m’allonger et d’attendre qu’il ait fini sa course. En fait, je m’éloigne doucement et rentre dans une agence de voyage tenue par Otilia. Elle doit organiser un voyage pour un groupe de 20 jeunes de 16-18 ans du 18 au 23 janvier 2007 - vers la France (à Paris). Je lui propose de l’aider en même temps que je lui demande si elle connaît des centres caritatifs ou association d’aide au plus démunis (enfants ou adultes) à Ploiesti.

L’une de ses amies, Georgette se dévoue justement pour ces causes et elle me propose de l’appeler. En l’attendant, rendez-vous pris a 13h30 avec Georgette, je recherche avec succès un lieu d’hébergement pour les jeunes à Paris et me renseigne sur les visites (château de Versailles, Le Louvres, Disneyland que je n’hésite pas à contester car le voyage est pris en charge par une association francophone) et les transferts aéroport Beauvais/Paris et 3 days pass RATP. Déjeuner avec Jionut et un couple d’amis. Au menu: chorba (soupe de tripes à la crème) + mamaliga (polenta = purée de farine de mais), spécialité roumaine. Stangio bafouille l’allemand pour avoir traîné ses bottes en Allemagne et s’occupe bénévolement d’une maison qui abrite 14 adolescents (garçons/filles moitié/moitié). Elle est visiblement en cours de construction comme bon nombre d’habitation dans le pays qui attendent de l’argent frais pour continuer le gros œuvre (menuiserie et maçonerie).
Stangio ne fait que superviser sa petite équipe et veille à la logistique et la construction d’une nouvelle bâtisse auquel participent les jeunes et qui abritera 20 jeunes et anciens. Côté garçons, ça laisse plutôt à désirer, sent le renfermé tandis que côté filles, c’est très aéré et propre. La maison actuelle leur est prêtée par une amie qui les soutient. Je vide mon sac car par chance les pantalons (8), les t-shirts (13), les pull-overs (8) correspondent aux tailles des pensionnaires. Avec Georgette, avant de quitter, nous goûtons un délicieux jus de raisin conserve naturellement dans une dame-jeanne en verre, offert et produit par Stangio.

Mardi, visite d’un home d’enfants administré par l’état roumain. Georgette me fait savoir que je ne peux faire que des dons de vêtements ou/et de jouets neufs. Je n’hésite pas à lui faire comprendre que je doute de la confiance du personnel surtout quand on est à l’écoute des médias français relatant l’état des orphelinats dans le pays après la chute du dictateur. Je pense qu’il est tentant de détourner de l’aide venant de l’étranger à son profit. Je n’ai pas les moyens d’apporter des effets neufs et préfère me concentrer sur des lieux plus nécessiteux. Je ne veux pas insinuer que les jouets peuvent très bien devenir ceux des enfants du personnel à l’approche de Noël mais les murs ne parlent pas. Par ailleurs, on ne me propose pas de visiter l’endroit. J’ai le droit de façon formelle à une tisane. Nous quittons.
Otilia m’a propose une journée a Bucarest où elle a à faire. Elle s’y est rendue pendant 31 ans tous les jours soit en train ou en conduisant car elle y avait son agence. Elle l’a déménagée à Ploiesti mais se rend 2 à 3 fois par semaine dans la capitale car c’est là-bas que tout se passe. En arrivant au parc des expositions où se tient une foire aux livres et un salon réservé aux dentistes, je là suis quand elle distribue les programmes de son agence pour le nouvel an à chaque représentation commerciale. Elle assiste ensuite à deux réunions, l’une concernant les conséquences du tourisme sur l’environnement, la seconde au cours de laquelle je la rejoins est une activité charitable. J’ai pu visiter le musée d’art moderne avec une exposition d’Antoine Bourdelle, disciple de Rodin qui influença l’école roumaine de sculpture.
Je complète ma visite du musée le lendemain et marche le long des rues bordées de bâtiments somptueux dans ce Bucarest souvent considéré comme le petit Paris des Balkans.

En quittant la ville le samedi, je rencontre un couple de Syriens auquel je demande ma direction. Samir me dépose en dehors de la ville. Officier dans l’armée syrienne, il a quitté son pays natal et est venu étudier avec sa femme en Roumanie en 2000. Ils ont 3 enfants inscrits gratuitement a l’école internationale car sa femme y enseigne l’arabe. Elle reçoit un salaire de 500 euros au lieu de 1000 euros (élevé pour le pays) mais s’il leur fallait payer la scolarité de leur progéniture, la facture s’élèverait à 11500 euros annuels (3500 euros par élève). Samir me confie que la Roumanie est plus corrompue que la Syrie. Les Arabes sont pourtant fort dans l’art de manier le backshish (mot d’origine arabe). Plus étonnant encore, il cautionne la politique étrangère de G. Bush et pense que la France et l’Allemagne ont tort de ne pas se ranger à ses côtés. Il a selon lui une vision claire des choses et du danger imminent que représente l’Islam qui veut embrasser le monde.


La Bulgarie: La folie immobilière des Anglais. J’ai pu traverser le Danube et passer la frontière mais je reste plante à Silestra jusqu’à ce qu’un combi bleu s’arrête avec Alessandra, Italienne au Volant et Patrick, Irlandais à ses côtés. Elle a emprunté et acheté 4 propriétés pour la somme de 20000 euros. Ils m’invitent à passer la nuit avec eux. Je sais que ce ne sera pas de tout repos car ils ont eu tous deux des vies mouvementées (handicap, prison). Patrick est alcoolique chronique. Alessandra le met en garde mais n’arrive pas à le freiner. Il devient agressif. J’entends tellement d’histoires incroyables que je ne me souviens plus de la moitié le lendemain.

A Varna, les agences immobilières pullulent. Il faut établir une compagnie et payer des droits d’enregistrement - variant de 250 a 600 euros - pour pouvoir investir dans une propriété (maison + dépendances). Les organisations mafieuses construisent à la va-vite et les prix exorbitants sont autour de la Mer Noire 5 fois supérieurs à la normale dans le pays. C’est une façon de blanchir de l’argent à l’aube de l’entrée de la Bulgarie dans l’Europe Les Britanniques en grand nombre ont la main mise sur le marché immobilier concernant l’achat/vente Voila qui me rappelle ce qui se passe dans certaines régions de l’hexagone. Etrange coïncidence. Inutile de dire qu’avec la conjoncture du marché immobilier, les prix flambent et la vie augmente dans un pays où le salaire moyen est ridicule (150 euros).

Au pied de l’appartement où je réside, il suffit de traverser le parc et descendre sur la plage. Quand je la longe la première fois, je suis surpris d’y trouver une piscine en plein air avec des eaux thermales dans lesquelles baigne une demi douzaine d’anciens. Je porte le maillot de bain et ne peux laisser passer l’occasion d’un moment de détente. Il y un rapport d’une femme pour dix hommes dans l’eau. Le fait que les douches et vestiaires soient à ciel ouvert ne peut pas mettre en confiance la gente féminine surtout quand l’on sait qu’une route les surplombent ! Sans dire un mot, je me déshabille après avoir tâté de l’eau qui m’apparaît mitigée et plutôt tiède. Apres une demi heure dans l’élément liquide près de la bouche d’arrivée d’eau, je transpire et préfère quitter le bassin vermoulu à cause du manque d’entretien. D’autres occupations m’attendent mais le moment a été exquis. Mon premier bain turc avant l’heure...


En route vers Istambul: la Bulgarie avant de traverser la frontière est dans un état de désespoir total. La famine a-t-elle sévit pendant 1000 ans pour retrouver les bâtiments sans toit, dévastés et désertés. La région est démunie a un tel point que de l’autre côté, la Turquie apparaît un Eldorado avec une croissance économique qui saute au yeux, un mieux vivre, un étalage presque honteux de richesses et d’abondance. Une qualité de vie que les Bulgares de la région en majorité turcophones n’ont jamais connu a cause du communisme. Les deux derniers petits frères à joindre la communauté européenne ne sont pas en mesure de faire face aux exigences européennes. Fallait-il attendre 2009 pour les intégrer ou tout doit-il nécessairement se faire dans la précipitation ? La Turquie, hormis le clivage culturel du principalement a la religion, m’impressionne par son activisme et enthousiasme économique tout a fait capable de doper les marchés internationaux. Qu’il est loin le temps des Ottomans !

La visite des deux demi frères. Il est des vi(e)sites qui en masquent/cachent d’autres. Certain(e)s vivent dans l’ombre de leur(s) prochains. D’un point de vue pratique (le quotidien), économique (les rapports nord/sud), politique (allégeance d’un système a l’autre), qu’est-ce que cela signifie ?
Un nom « béni des Dieux » ne suffit pas à s’affirmer. Encore faut-il choisir le bon numéro. Si, après ça, vous ne croyez toujours pas a la numérologie ! Il y a beaucoup de perdants et peu de gagnants. Des chanceux et des malchanceux ! Le 16 est un bon numéro. 1+6= 7 c’est-à-dire sur la voie de la spiritualité ! Petit être en devenir, il va encore falloir souffrir si tu veux monter sur la plus haute marche.

Quelle incidence les évènements ont-ils sur une vie ? Qu’est-ce qui fait que l’un devient le préféré/adulé ou hué/mal aimé, célèbre/en vue, baigne dans les bas-fonds ou émerge de la foule/fange, vis à l’extérieur/intérieur (intimement,en rapport avec le soi/publiquement), l’un incarcéré, l’autre sur un piédestal. Certains animaux/fleurs sont nocturnes/diurnes. Est-ce un début de réflexion ou seulement un tour de piste/cirque qui vous fait tourner en rond et voir la vie comme une illusion/miroir aux alouettes ?

Dans un pays/une famille, un humain/enfant empêchera l’autre de croître/croire et le séquestrera en lui imposant son régime. Il est le maître des croyants catholiques, chef religieux doit-on ajouter spirituel puisque la spiritualité n’a plus cours dans le vieux monde à l’ordre du jour, sa visite me confine entre mes quatre murs de briques rouges. Deux prénoms qui se rencontrent dans une ville millénaire comme deux identités qui s’évitent/se côtoient (l’histoire/exemple de Schröder et son demi frère SDF dont le Chancelier avait honte est réel).
Je suis parqué/bloqué/ interdit de sortie car les pi(ss)euses vanités de ce monde se baladent sur le tapis rouge - la carpette cardinale - pour remettre de l’ordre dans les croyances, réaffirmer leur potentiel spirituel sur la vieille Europe et donner les grandes lignes à suivre au petit peuple. Leur sécurité/santé dépend-t-elle de mes faits et gestes. Elle m’empêche de bouger tellement je suis encerclé/entouré/muselé par les uniformes unicouleur uniglobaux mondiaux.
Je suis victime d’une machinerie monstrueuse entre les mains de laquelle je ne suis qu’un pion en suspend/qu’un polichinelle accroché à un élastique/qu’un saltimbanque funambule sur son fil. Le monde peut changer d’avis/se rétracter - Chirac/Benoît 16 à propos de l’entrée de la Turquie dans l’Europe décident de l’ordre/la marche du Monde - je ne peux virer de bord selon mon gré/bon vouloir sans occasionner pertes et fracas sinon me transformer dans l’âme (elle n’existe pas)/l’esprit. La liberté de penser commence ou s’arrête celle des autres.


Retour rapide via la Serbie : A la frontière turco bulgare, je saisis une occasion avec Djihad, commerçant syrien en transit vers Budapest. Quel nom ! Il est le treizième d’une fratrie de treize frères et dont le quatorzième est une demoiselle (13 garçons et une fille dans la famille)! Son autre trait particulier est qu’il a gagné le loto en Syrie il y a cinq ans environ – une somme rondelette de 500 000 U.S dollars qu’il a dépensé depuis sans compter. Il se retrouve à faire transiter des marchandises – pâtisseries et confiseries depuis la Syrie vers Budapest où il est marié et a une fille Sara.
Je suis deux fois fouillé à l’entrée en Serbie. Est-ce parce que je reviens d’Istanbul en stop ou bien parce que je roule avec un arabe ?
Je lâche Djihad à hauteur de Nis (Serbie) quand il veut s’arrêter à 4h00 du matin pour prendre une chambre d’hôtel (52 euros). J’ai conduit en Bulgarie 100 km après la frontière jusqu’à Sofia où il a repris le volant. Il s’est ensuite trompé de route et nous avons perdu 2h00. Au moment où nous nous arrêtons, nous aurions déjà du avoir dépassé Belgrade et être à la frontière serbo-hongroise vers 7.00 a.m. Il lui est plus facile « d’arroser » les douanes de nuit plutôt qu’avec l’équipe de jour. Il attendra donc la journée pour repartir vers 17h00. Je me réfugie dans un vieux bus abandonné derrière la station service déjà occupé par deux chiens qui y ont élus domicile. Je ne semble pas trop les déranger et leur impose ma présence sans pour autant les en chasser. La nuit sur un morceau de moquette afin de protéger mon duvet sera courte mais calme. Pas d’aboiements, ni de gémissements.

7h30 : Après quelques essais infructueux auprès de camionneurs slaves, je décide de marcher jusqu’au péage distant de 500 m et demander au fur et à mesure que les voitures ralentissent les unes derrière les autres. Goran m’embarque après m’avoir demandé mon passeport pour vérification. Il parle très bien l’anglais et nous avons le plaisir de converser sur la situation économique du pays et la place de la Serbie dans l’Europe. Je reste dans son véhicule où à proximité lors de sa réunion dans la capitale serbe et traverse la Sava un peu plus tard avec lui, celle-ci se jette dans le Danube au pied de la fameuse forteresse du Kalamegdan.

Je trouve refuge pour la nuit dans une maison qui m’est prêtée par un jeune couple Serbe d’origine hongroise (magyar) car le nord de la province de Voïvodie faisait partie elle aussi de la Grande Hongrie.
La première voiture qui se présente s’arrête dans le petit matin embrumé et lorsqu’elle me dépose, il me reste 2 km à parcourir à pied jusqu’à la frontière que je passe sans anicroches. L’Europe malgré mon trop plein de liqueurs m’ouvre ses portes de retour avec quelques tampons en supplément sur le passeport. J’attrape une voiture au passage de la frontière que je prends toutefois soin de passer seul à pied. Le chauffeur était cadre en 1990 dans l’ex-Yougoslavie et touchait 1000 D.M (Deutsch Mark, environ 3300 frcs soit environ 500 Euros), une somme considérable à l’époque qui lui assurait un bon niveau de vie. Il a investi et vit de ses intérêts aujourd’hui. Il m’assure que l’Ouest a volontairement provoqué la guerre dans les Balkans et «décomposé » la mosaïque de fédérations de Tito car le pays tel qu’il était aurait probablement refusé l’intégration dans la Communauté Européenne (CEE) préférant rester en dehors.
D’où est sorti Tujman (Croatie) ? Qui l’a installé au pouvoir ?
En « divisant pour mieux régner », provoquer le chaos engendré les nationalismes, l’Occident -les Européens par leur attentisme ne valent pas mieux que les Américains – en jouant les bons Samaritains/gendarmes de la planète avec la KFOR peut imaginer un jour l’entrée de chacune des petites entités (Croatie, Bosnie, Herzégovine, Macédoine, Serbie…) dans la C.E.E leur accordant ainsi une faveur de pouvoir joindre ce vaste marché commun au service des multinationales qui se payent le luxe de racheter les entreprises à des prix défiant toute concurrence (100 000 euros). Au bout de 3 années tout au plus par manque à gagner du à une certaine carence de la main d’œuvre locale pas suffisamment qualifiée, l’usine ferme et les produits (alimentaires) sont importés de l’Ouest à un prix inaccessible au plus grand nombre des consommateurs à cause du nivellement des prix exigé par la commission des finances européennes qui siège à Bruxelles. Le coût de la vie augmente. Comment y faire face avec un salaire de 200 euros ?

Je fais le retour de Budapest vers Strasbourg en un temps record de 11h30 de trajet pour plus de 1200 km de distance. En allant vers Auxerre, le lendemain, 08 décembre rejoindre le cours de Satipatthana, le Grand Discours sur l’Etablissement de l’Attention du Buddha basée sur la perception consciente des sensations, je fais route avec Fred. Leconte qui traite lui les sportifs de haut niveau sur le plan émotionnel. Lorsqu’il m’explique sa démarche, je comprends tout à fait qu’il puisse gérer le stress continu d’un compétiteur en faisant un travail sur les émotions. Il sait qu’il devra se tourner vers l’Asie un jour et comprend très bien le travail de Vipassana basé sur l’observation des sensations corporelles liée à la respiration. Quel coïncidence – une rencontre n’est jamais le fait du hasard - et quel parallèle - on peut jeter un pont entre ces deux technique, l’une qui assure le développement et les performances sportives de l’individu et l’autre à visée plus spirituelle ! Visitez www.mahi.dhamma.org et www.dhammadana.org